Christophe Bernard, ici avec son fils Damien, est éleveur-engraisseur |
Christophe Bernard est
éleveur à Quaix en Chartreuse. Avec son épouse, il est propriétaire d’une
exploitation agricole acquise par son grand-père en 1936, spécialisée dans la
production de viande bovine. Son élevage actuel est composé de 72 bovins qu’il
élève sur 70 hectares entre les communes de Mont Saint Martin, Quaix en
Chartreuse et Saint Martin le Vinoux. Lorsqu’il s’est installé, il a développé
un élevage de lapins, mais le bâtiment qui les abrite a besoin
d’investissements qu’il n’est pas sûr de faire. Son créneau, c’est vraiment la
viande : le bœuf qu’il engraisse et le veau élevé sous la mère qu’il
distribue par colis en vente directe dans sa ferme, à quelques encablures du
bourg. Il a choisi la Blonde d’Aquitaine, une race trapue, réputée pour ses
qualités bouchères, tendre et peu grasse par rapport au poids total.
Forcément, dans le contexte
actuel de crise de la viande de cheval et des plats cuisinés, son choix s’avère
judicieux. « Certains de mes collègues n’ont jamais autant vendu de bœuf
bourguignon ou braisé que ces derniers temps », précise Christophe.
« Et forcément, c’est bénéfique à l’abattoir du Fontanil ». Depuis
quelques semaines, les éleveurs ont maintenant à disposition un outil
d’abattage public multi-espèces sur ce secteur de l’Isère, ce qui ce révèle un
excellent choix (voir ci-dessous).
Pour les agriculteurs du
Balcon Sud de Chartreuse qu’on compte sur les doigts d’une main (Christophe est
pratiquement le dernier en activité principale), la vie n’est pas toujours
rose. Les parcelles sont accidentées et morcelées, le climat très changeant et
puis la proximité avec l’agglomération grenobloise fait que le contact entre
exploitation agricole et riverains amène parfois quelques tensions.
Le bio, il y pense, il s’est
renseigné, a pris des contacts, mais pour l’instant, par manque de temps il
reste comme il est, en agriculture raisonnée. « Mes fils verront ».
L’avenir de la ferme ne lui
fait pas peur, Christophe le voit plutôt de bonne augure. Cette vente directe
est vraiment un point fort pour lui avec ce consommateur qui est à la porte de
l’exploitation. « Notre rôle d’exploitant c’est quand même de nourrir les
populations. C’est vrai que nous, petits exploitants, on est un peu les parents
pauvres, mais il manque toujours de production bovine, il y a encore de la
place pour d’autres éleveurs ». Et puis, un point fort pour Christophe,
c’est son fils Damien, 13 ans, qui voit son avenir tout tracé : « Quand
je sors du collège, je suis à la ferme. Si je viens pas un soir, j’suis perdu
complet !… Faut que je vienne juste les voir (les Blondes). Forcément, ça
rassure.
Le renouveau de l’abattoir
Situé à sept kilomètres de l'abattoir du Fontanil, Christophe Bernard bénéficie amplement de cette
structure. « Je fais partie du comité d’usagers. Depuis deux ans on
était bénévoles pour relancer la machine et maintenant c’est pour la
faire tourner ». L’éleveur amène sa bête sur le site pour la faire tuer.
Elle y reste, est découpée puis stockée dans les frigos et mise en colis que
Christophe récupère. Ces colis, stockés à la ferme, sont ensuite vendus
directement à la clientèle de proximité.
Un élevage de 72 Blondes d'Aquitaine, une race à viande |
Le système de gouvernance
mis en place à l’abattoir le 19 février dernier fonctionne sous forme de SCIC
(Société Commerciale d’Intérêt Coopératif), une structure qui va, à terme,
racheter pour un euro symbolique la société qui gère l’abattoir. Ce sont donc
les éleveurs qui sont détenteurs de capitaux. Le CA mis en place comporte six
collèges non majoritaires : salariés, éleveurs, bouchers, collectivités
territoriales, marchands de cuir et peaux et restaurateurs. Christophe croit en
cette SCIC : « On veut redonner une confiance locale et départementale à
cet abattoir, ramener une meilleure image de marque pour un service de
qualité et de proximité. ». (voir aussi D.L. du 4 mars 2013).
Élevage des veaux sous la mère |
Les agriculteurs et la P.A.C.
Les agriculteurs ne s’en
cachent pas et Christophe est de ceux-là : l’aide par la PAC apporte de la
trésorerie aux exploitations. « Je ne suis pas un chasseur de primes, j’ai
52 ha référencés PAC sur 70 que j’exploite. C’est vrai que si ça s’arrêtait, je
me demande comment on ferait, mais il faudrait revoir la répartition des
aides » précise-t-il. « Entre nos secteurs pentus où on fait
100 % d’herbe, et les gros céréaliers qui font 200.000 € de primes par an, il
n’y a pas de comparaison possibles. Celui qui a quatre bêtes touche
pratiquement les mêmes aides que moi qui en ait 15 fois plus. » Le
ministre de l’agriculture Stéphane Le Foll est plutôt dans cette optique,
proposant d’aider majoritairement les premiers hectares ce qui permettrait
ainsi de renforcer les exploitations d’élevage. « Le système de la PAC est
en place depuis longtemps, il bénéficie à tout le monde mais globalement, il
est quand même assez mal ressenti par le monde agricole » conclue
Christophe.
Article paru dans le Dauphiné Libéré le 31 mars 2013
L'intégralité de l'interview de Christophe Bernard a été publiée dans l'Echo de Proveysieux (en vente dans toutes les bonnes boucheries).
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